Tuesday, October 8, 2013

Gala Dali



Il y a de ces vies, comme ça, hors du commun des mortels. Que l’on aime ces vies exceptionnelles, qu’on les envie, qu’on les admire ou que l’on ne les souhaitent pas pour soi même, on en aime en parler. Les grands de ce monde sont souvent des êtres à plusieurs facettes, des mythes que l’on casse pour mieux les reconstruire.
Voici l’histoire d’une « petite paysanne russe » comme elle aimait s’appeler, une vie de femme, une vie de muse. Elle ne sera jamais belle, mais son corps de proportions parfaites sera l’inspiration de quelques grands noms des Arts. Ni trop belle, ni trop moche, elle inspire une présence lourde, sévère,  son feu est de glace comme celui de la Russie. 1913, voici Helena Diakonova, la future Gala, qui débarque en Suisse.



Venue de Russie  fin de soigner ses poumons dans un sanatorium, la petite russe rencontre le jeune homme qui deviendra Paul Eluard. Les 2 jeunes gens partagent un amour des livres, des mots et pensées ainsi qu’une certaine rébellion contre la petite vie bourgeoise qui leur est assignée. Complices, ils se marieront et traverseront ensemble les débâcles de la première guerre. Une petite fille Cécile, sortira très tôt du feu de leur amour, une fille que Gala abandonnera à Eluard, toujours fidèle à son premier amour. Un groupe d’artistes se forment  en même temps, le couple participe à la naissance du mouvement Dada. Jusqu’à ce que Gala tombe amoureuse d’un autre. Entre en scène, un jeune allemand, un peintre, lui aussi tiraillé par ses quêtes intérieurs, voici Max Ernst. Une histoire d’amour à 3 s’en est, sous le même toit, l’un écrit, l’autre peint. Gala n’aime pas ce rôle, elle ne peut être une femme qu’ un homme à la fois.
C’est le temps de la jeunesse, la fin de la guerre, les artistes se rebellent contre ce système qui les a envoyé dans les tranchées de l’horreur. De ce rejet des valeurs communes, le cercle dada prend naissance comme une rébellion contre un grand tout. On coupe tous les ponts, on se permet tout, l’art ne fait pas de politique, la politique est art et l’art doit tout dévoiler, surtout ce qui est enfoui au plus profond de l’être humain.





Séparation du trio, regroupement, les cœurs se déchirent et se reforment.  Paul s’enfuit dans les îles, revient, Max disparaît de l’image. Les vers de poésies s’inspirent du drame, les coups de pinceaux décorent les murs. Après 15 ans de vie commune, lassée par son couple, aucune fibre maternelle en elle, sauf pour les hommes qu’elle aime, Gala retombe amoureuse. Eperdument amoureuse, car, Gala ne fait rien, Gala est une muse mystérieuse, sombre et profonde. Une sorcière russe, une medium aux autres mondes, une catholique avec la foie dans les tripes, Gala suis son cœur. Gala aime, c’est tout, elle ne sait qu’aimer. Gala est une femme amoureuse de l’Art, et des hommes qui la fascine.  Si elle n’a jamais pris soin de sa fille Cécile, c’est que ses enfants sont les génies qu’elle soutient, encourage et développe suivant ses goûts puis les crache une fois le repas terminé, telle une mante religieuse.




C’est en Catalogne, un petit village de pécheurs du bout du monde, territoire sec et a première vue inhospitalier pour la parisienne aux goûts de modes qu’est devenue Gala, qu’un amour mythique va naître. C’est dans son village de Cadaqués que Gala tombe sous le charme d’un jeune peintre, encore relativement inconnu, de 11 ans plus jeune qu’elle. Entre en scène Dali. Gala ne reviendra pas avec son mari a Paris, le mari deviendra un ex, et Gala donnera les prochaines 50 années a donner une forme concrète au génie de Dali. Plus de 40 ans de fidèles services, de dévotion totale, elle le suis partout ou il va, le couple est inséparable. En 40 ans de voyage, la légende Dalinienne va devenir une fortune colossale. Gala gère, Dali peint, il joue un double jeux féroce et lucide, il décore, imagine, il crée des objets, bijoux, meubles, bref il fait son cinéma. Car Dali est un grand timide, incapable d’évoluer seul dans ce monde qui lui est presque étranger. Dali l’a bien compris, pour que l’on parle de lui, il faut faire du cinéma. Si c’est derrière un masque de folie et d’extravagance qu’il se cache, il n’en est pas moins un génie doué d’une ambition digne des dieux grecques. Tel un être venue d’une autre planète, Dali peint ses fantasmes, il illustre ses hallucination développant sa célèbre méthode paranoïaque critique. Il ne se drogue pas, il est la drogue, comme il aimait à dire. Derrière la scène, juste à ses cotes, toujours et encore, il y a Gala.



Le couple farouchement individualiste, restera fidèle à ses idéaux jusqu'à la fin, le seul idéal étant : eux-mêmes. Alors que l’ex mouvement Dada, devenue le cercle des Surréalistes, se tourne vers la Russie et le communisme en quête d’ un idéal politique, les Dalis resteront écartes du cercle et vireront carrément de l’autre cote. Pour eux, aucune conscience sociale, ils ne veulent pas souffrir le martyr, ils veulent jouir pleinement et absolument de la vie et de ses richesses. Alors que les Surréalistes prônent un art qui doit participer à la condition de la population, un art social, un art politique; les Dalis eux, s’affichent avec les richissimes de ce monde, les millionnaires, ducs et comtesses, collectionneurs d’art et saint patrons. Les Dalis le disent bien haut et fort, ils sont farouchement Dalinien.




Des USA à Paris, au village de pécheurs de Catalogne, l’empire des Dalis s’est construit à travers les décennies et mondanités. Si les dernières années peuvent sembler un peu tristes, ces monstres resteront graves à toujours dans la mémoire des Arts. Dali, continue de s’amuser, il s’entoure de jeunes gens, beaux et nains, de préférences à tendance androgyne. Dali aime voir, il jouie de ses yeux, étant lui-même effare a l’idée de contactes physiques. Gala, elle, le visage tiré et retiré, se réfugie dans les bras de jeunes hommes, loin des brouhahas de la vie agitée de Dali s’affichant alors aux bras d’Amanda Lear. Gala n’offre plus que peu de temps à Dali, qui souffre de ne pas avoir sa « béquille » proche de lui, Gala lui manque, car c’est elle et elle seule qui est capable de garder en ordre la vie du génie toujours enfant. Passé 85 ans, Gala n’en peut plus de gérer l’empire dalinien, la mort rode et la terrifie, elle se prépare en bonne chrétienne. La maladie, le fisc, les scandales, la perte de soi, un peu de folie,  rattrape les monstres sacrés pourtant bien humains. Gala meurt aux cotes de Dali lors d’une sieste dans son château de Pubol. Dali ne s’en remettra pas, sa plus farouche ennemi, la mort, le prendra dans ses bras 7 ans plus tard.



Que l’on crache sur le couple Dali, que l’on adule les Dalis, les Dalis s’en foutent. Ce qu’ils voulaient après tout, c’est vivre leur légende personnelle, vivre tant qu’ils en avaient le temps. Une muse et un grand timide géniale caché sous le masque d’un provocateur, le couple restera un mythe vivant. Tout pour le fric ? Une femme russe intéressée et avide, rongée par la peur d’être un jour malade et sans ressources ? Une amoureuse des Arts,  par-dessus tout une amoureuse d’elle-même ? Scandaleuse mystique ? Personne ne le sera jamais, Gala reste un mystère…Elle est une femme qui ne regarde pas derrière. Une femme aux multiples vies, elle est Gala, la muse redoutable. Tant aimer par son double qui si il disait "n'ayez pas peur de la perfection, vous ne l'atteindrez jamais", peut être qu’après tout, à leur manière, ils ont atteins leur propre forme de perfection en goutant à cette immortalité dont ils rêvaient tant.

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